LES ANNÉES 60
Le nouveau franc, Johnny Hallyday, la pilule...
C'était le temps des commencements. Un monde finissait. Un autre naissait. Avec le recul, cette décennie prodigieuse, si proche et si lointaine, ne cesse d'étonner par sa vitalité, son inventivité, son audace. Et bien plus que la nostalgie d'un prétendu âge d'or (ce que les années 60 ne furent pas, pas plus qu'aucune époque, jamais), c'est cette énergie qui continue de fasciner jeunes et moins jeunes.
C’estt l'ère des "premières". Pour la seule année 1960, citons pêle-mêle : la création du "nouveau franc " ; la première explosion nucléaire française à Reggane ; l'accession à l'indépendance des colonies françaises d'Afrique ; l'inauguration de Brasilia ; les débuts sur scène des Beatles et de Johnny Hallyday ; aux Etats-Unis, la légalisation de la pilule et le vote de la loi sur les droits civiques ; le lancement du paquebot "France" ; la fondation de l'Opep ; le premier 100 mètres en dix secondes (par l'Allemand Armin Hary). Cours, camarade...
C'éstt le temps de toutes les révolutions : sexuelle, morale, artistique (Nouvelle Vague, pop art,...), scientifique et technologique (première greffe du cœur, premier homme dans l'espace, bientôt sur la Lune, lancement du projet Arpanet, ancêtre d'internet). Révolution culturelle, aussi, pas celle de Mao, la nôtre, qui vit la génération de l'après-guerre imposer des goûts musicaux, des usages vestimentaires, des codes de langage - le tutoiement de rigueur, un certain style d'humour -, dont on ne savait pas encore qu'ils seraient, eux aussi, "inoxydables".
Et bien sûr, révolutions politiques, qui furent surtout des insurrections de la jeunesse estudiantine. D'un 68 l'autre : avril à Prague, mai en France, août aux Etats-Unis, octobre au Mexique.
Le grand monôme libertaire de Mai signait le divorce avec le Général, qui devait être consommé l'année suivante. Et l'écrasement, à Prague, du "socialisme à visage humain" se lit rétrospectivement comme un signe avant-coureur de l'effondrement du système soviétique.
Ce ne fut pas un âge d'or. Les Français d'alors travaillaient beaucoup et vivaient chichement. En 1962, un ouvrier gagne en moyenne 580 francs par mois (90 euros), quand un transistor bon marché en vaut 245. La voiture, le téléphone, la télévision sont des luxes de nantis. Le Français moyen n'a ni salle de bains ni machine à laver. Dans une France qui ne compte guère plus de 200.000 étudiants, 3,4% des fils d'ouvriers font des études supérieures. Autant dire que l'ascenseur social était sérieusement grippé.